Popsu, la plateforme d’observation des projets et stratégies urbaines, met en dialogue acteurs locaux et milieux de la recherche pour mieux comprendre les enjeux et les évolutions de l’espace urbanisé. Les villes inondables, thème dont elle s’est emparée en 2014 par le biais de son programme Europe, a donné lieu à un livre éponyme, publié aux éditions Parenthèses, qui concentre les approches croisées de ces équipes pluridisciplinaires. « Les études sur l’urbain restent peu accessibles à ceux qui le construisent sur le terrain, explique l’architecte Jean-Jacques Terrin, qui dirige le programme et a assuré la coordination de l’ouvrage. Au Popsu, nous essayons donc de confronter la recherche à la pratique. » Le réchauffement climatique multipliant les inondations, les métropoles ne cherchent plus désormais à repousser l’eau, mais à comprendre son cheminement et à l’accompagner. « C’est un véritable changement de paradigme, confirme le coauteur. Aujourd’hui, les crues représentent une situation naturelle dont il faut certes se protéger, mais aussi profiter, en appréhendant ses dangers. Cela implique donc des modifications sensibles dans la façon d’aborder les risques. » Amsterdam, Hambourg, Lyon… dix cités présentent ici leur stratégie pour vivre avec ces catastrophes. Mais à la différence des Pays-Bas et de l’Allemagne, à la pointe du renouvellement des pratiques architecturales en zone urbaine inondable, la France se laisserait encore… déborder. « Les collectivités françaises souffrent d’une vision très centralisée de l’administration, analyse Jean-Jacques Terrin. L’État édicte des règles sécuritaires très précises à des acteurs locaux qui ont beaucoup de mal à appliquer les directives nationales dans un contexte de proximité. »
L’arche, le mur ou l’éponge ?
Ces tensions ne devraient cependant pas empêcher les métropoles hexagonales de s’ouvrir à de nouvelles démarches. En fin d’ouvrage, l’architecte et paysagiste Nicolas Gilsoul fait le tour des solutions imaginées au niveau mondial. Il en dégage cinq stratégies types : l’arche, le mur, l’éponge, l’étagement et la déviation. Sa conclusion : « Les dispositifs innovants ne naissent pas de l’invention d’une stratégie, mais de la réinterprétation et de la combinaison d’archétypes existants. » Il imagine ainsi le déploiement d’innovations techniques sur de grands territoires et se penche sur le cas de BosWash, arc urbain continu sur la côte est des États-Unis, le concevant comme un archipel artificiel de 1 200 kilomètres. Dans les « replis humides du Grand Paris », environ 830 000 personnes pourraient à l’avenir subir des inondations. Qui les sauvera du déluge ?