L'analyse des données de l'Insee à l'échelle des départements métropolitains révèle des disparités fortes entre les territoires. Sur la base de deux indicateurs, les pourcentages et le nombre, les données sont croisées et indiquent que les territoires vieillissants ne sont pas nécessairement ceux où le nombre de seniors croît le plus rapidement. À cela s'ajoute la croissance démographique importante entre 1968 et 2014, où la France est passée de 49 millions d'habitants à plus de 67 millions.
En 1968 : un peu plus de six millions de 65 ans et plus
En 1968, les 65 ans et plus représentent 12,6 % de la population totale. Seul le département de la Creuse (23) compte 21 % de seniors. Suivent l'Ariège (09) et les Alpes-Maritimes (06), autour de 19 %. Avec seulement 8 %, la Moselle (57) est au contraire le département où la proportion est la plus faible, suivi du Doubs (25) et des cinq départements franciliens (sur les huit), les Yvelines (78), la Seine-Saint-Denis (93), l'Essonne (91), le Val-d'Oise (95) et le Val-de-Marne (94) qui concentrent autour de 9 % de plus de 65 ans. Néanmoins, la répartition démographique révèle une autre géographie de l'âge des territoires. Seul les Alpes-Maritimes, avec 133 000 seniors, est l'un des départements les plus âgés en masse et proportion. En effet, quand la Creuse et l'Ariège totalisent 60 000 seniors, Paris (75) en accueille plus de 384 000 et l'Île-de-France 16,5 % du total national. Viennent ensuite les départements du Nord (59) et des Bouches-du-Rhône (13), avec respectivement 267 000 et 180 000 personnes.
En 2014 : 12 millions de plus de 65 ans
En 2014, les seniors représentent 18,2 % de la population. Ils sont presque deux fois plus nombreux qu'un demi-siècle auparavant. Désormais, huit départements dénombrent plus de 25 % de plus de 65 ans et la Creuse, avec près de 28 %, reste celui qui possède le taux le plus important de seniors. Arrivent ensuite le Lot (46), la Nièvre (58), la Dordogne (24) et le Cantal (15). L'Ariège conserve un taux important (24 %) de seniors, tout comme les Alpes-Maritimes (23 %). Les taux en Île-de-France sont eux inférieurs à 15 %, le plus faible se trouvant en Seine-Saint-Denis : 11 %, bien en dessous de la moyenne nationale. Si la part des seniors parisiens a très légèrement augmentée entre 1968 et 2014, en 2014, leur nombre atteint 350 000. Paris est passé à la troisième place des département comptant le plus de seniors, derrière le Nord et les Bouches-du-Rhône. L'Île-de-France ne regroupe plus que 14% du total national. Quand seulement 11 départements dépassaient la barre des 100 000 seniors en 1968, ils sont au nombre de 44 à présent.
Un enjeu pour les métropoles et les villes centres
Dans une France dont la population de l'aire urbaine est passée de 70 % en 1968 à 95 % en 2014, l'analyse de l'évolution démographique sur cette même période souligne les enjeux à venir dans les 11 plus grandes villes françaises. En 1968, Paris, Marseille (13), Lyon (69) (1), Bordeaux (33) et Nice (06) concentrent des taux supérieurs à la moyenne française de 12,6 %, avec un maximum de 19,3% à Nice. Dans des proportions moyennes : Toulouse (31), Nantes (44) et Strasbourg (67) affichent entre 10 et 12 % de seniors. En revanche, Rennes (35) n'en compte que 8,2 %, un taux relativement faible. Ensemble, en 1968, ces métropoles représentent 12 % de la population totale et 13 % de seniors. En 2014, les ratios ont chuté respectivement à 9 et 8 %. Seules Nice et Marseille, avec respectivement 22,8 % et 18,4 % de seniors, restent au-dessus de la moyenne nationale de 18,2 %. La proportion de seniors parisiens est quant à elle en augmentation, bien que leur nombre ait diminué. Il faut rappeler que la Capitale est en décroissance démographique et qu'elle a perdu 350 000 habitants en près de cinquante ans. Lille (59)(2) a conservé le même nombre de seniors représentant seulement 10,3 % de ses habitants. Si Bordeaux (33) a également perdu des seniors, elle reste dans la moyenne des autres villes françaises. Rennes et Montpellier (34) ont en revanche inversé la tendance en accueillant deux fois plus de seniors. Ces deux villes sont au même niveau que Lyon, Nantes, Strasbourg (67) qui recensent environ 14 % de seniors. Il est à noter que Montpellier a connu la plus forte progression démographique : avec plus 70 % d'habitants depuis 1968, elle compte aujourd'hui 12,9 % de seniors.
La péri-urbanisation et la métropolisation expliquent en partie ces résultats et il serait intéressant d'observer les données à l'échelle des intercommunalités. Dans la mesure où une population vieillissante a besoin d'une offre de services et de transports de proximité, les villes-centre qui en sont déjà dotées pourraient y répondre plus significativement. Un enjeu souligné par la mise en œuvre du réseau des Villes amies des aînés, dont les bonnes pratiques en faveur du vieillissement de la population commencent à se développer. Dès 2010, Lyon a rejoint le réseau, devenant la huitième ville mondiale et la troisième agglomération française à s'engager. Paris est devenue en 2016 la 90 e ville du réseau francophone et la 500 e à l'échelle mondiale. Le réseau francophone compte aujourd'hui 115 membres et organise chaque année un concours primant des projets exemplaires pouvant encourager d'autres villes à passer à l'action.
1. Depuis le 1er janvier 2015, Lyon ne fait plus partie du département du Rhône mais de la Métropole de Lyon.
2. En 2000, Lille a fusionné avec Lomme qui comptait environ 28 000 habitants.
⇒ Article paru dans le dossier Villes et seniors d'Ecologik 59