Quelques années après la construction de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée, du parc Disney ou encore du centre commercial Val d'Europe, la croissance urbaine ne s'est pas tarie dans cette zone de l'est parisien. Parmi les programmations d'envergure, l'écoquartier de Montévrain a pris l'orientation du durable.
« Pour le quartier, l'école est certes un équipement, mais elle est aussi une présence familière, rassurante, un lien discret avec la République, un creuset », explique Vincent Parreira, fondateur d'AAVP architecture.
La mission citoyenne que s'était fixée l'équipe d'architectes était d'autant plus ardue que le site choisi pour l'opération au moment du concours était une parcelle vide, bordée de vastes emprises agricoles. De plus, la commande spécifiait de concevoir un bâtiment passif, soit des besoins en chauffage inférieurs à 15 kWhep (m 2 .an) et une consommation ne dépassant pas 120 kWhep/(m2.an) pour tous les usages. Dans cet objectif, AAVP a mené un travail de précision pour doter le complexe des techniques les plus innovantes concernant la gestion des énergies, mais de manière à ne jamais enchâsser la création architecturale.
Des volumes fragmentés
« Dans ce contexte encore flou, le bâtiment prend position, s'organise jusqu'à former une ville miniature », raconte Vincent Parreira. La maternelle et l'école élémentaire sont en effet réparties dans des volumes accolés qui constituent néanmoins un front bâti quasi continu en périphérie de la parcelle. Faits de bois ou de béton, les différents éléments du programme se distinguent par leurs variations de hauteur et d'alignement de façades.
Le complexe, hors de tout standard, s'appuie ainsi sur le contraste entre de grandes surfaces lisses de béton blanc teinté dans la masse, à l'occasion percées de moucharabiehs à motif de losange, et des volumes en bois grisé texturé déclinant le même motif.
Invitation à pénétrer dans cet univers formel, les halls de chaque école présentent une double voûte apportant de la lumière et évoquent aussi bien un espace troglodytique qu'un dôme de la Renaissance. Placée en partie est de la parcelle, l'école élémentaire, déployée sur deux niveaux, conserve un lien direct avec le quartier en accolant son aire extérieure à l'une des avenues principales du secteur. À l'inverse, la maternelle au nord-ouest referme son plan en rez-de-chaussée autour de sa cour intérieure, les volumes du réfectoire et du centre de loisirs assurant la charnière entre les deux établissements.
Une technologie très discrète
La plasticité tout entière de l'édifice est parvenue à s'emparer d'un cahier des charges contraignant pour atteindre le niveau Bepas : les façades à ossature bois très isolantes alternent avec un procédé Duomur qui procure une bonne inertie thermique, en hiver comme en été, notamment renforcée par un système de ventilation double flux.
Les sols intègrent un plancher chauffant, l'isolation des terrasses est doublée (120 mm sous l'étanchéité avec également un isolant sous dalle), et la plus grande imperméabilité possible du bâti est recherchée sur les mises en œuvre courantes : traque des fuites sur la structure, calfeutrage étanche de tous les percements, jonction parfaite et continuité des isolants… , jusqu'au simple réglage des ferme-portes. Pour exploiter au mieux les apports thermiques, les volumes sont largement ouverts vers l'intérieur de la parcelle par des baies à triple vitrage, et ces dernières sont protégées des rayonnements solaires par des solutions adaptées à leur situation : volets en treillis de bois, stores extérieurs automatisés ou casquettes de bois pour tous les locaux orientés sud-ouest.
En définitive, l'édifice relève d'une technologie de pointe qui a l'élégance de s'effacer du résultat final : pour masquer la multitude d'installations techniques, les architectes ont dessiné une cinquième façade.
Sur les toitures engazonnées, des volumes de bois tressé abritent ces équipements et la centrale de traitement d'air (CTA). Ces sortes de paniers parsemés en toiture, lorsqu'ils ne sont pas abris techniques, sont mis à profit pour rehausser la hauteur des plafonds dans certaines salles et apporter de la lumière naturelle à claire-voie.
Alors que l'écoquartier a déjà passé deux étapes de validation répondant à la charte officielle, le premier groupe scolaire passif de l'Île-de-France a de son côté été salué par tous les usagers. Cette reconnaissance représentait une gageure, car un bâtiment passif nécessite l'appropriation de son mode d'emploi, lequel demande un lissage dans le temps de l'ensemble des fonctionnalités. Cet édifice aux métissages étonnants, façonnés par des jeux de traverses, de matières, de cadrages, de pleins et de vides, est à même de susciter « un apprentissage de la curiosité par l'architecture, une première rencontre avec les mystères du grand monde », comme l'exprime Vincent Parreira.
Article paru dans Ecologik 57 : Bâtiments passifs : actifs pour l'écologie (mars-avril-mai 2018)
FICHE TECHNIQUE
♦ Lieu : Montévrain, Seine-et-Marne.
♦ Programme : construction d'un groupe scolaire comprenant six classes de maternelle, dix classes d'élémentaire et quatre classes évolutives.
♦ Maîtrise d'ouvrage : Ville de Montévrain.
♦ Maîtrise d'ouvrage déléguée : Aménagement 77.
♦ Maîtrise d'œuvre : AAVP architecture (Vincent Parreira architecte mandataire).
♦ Bureaux d'études : Ingérop (AMO HQE), DVVD (structure), LBE (fluides), Ateve (VRD), 12ECO (économie du bâtiment), Altia (acoustique).
♦ Paysagiste : Atelier Roberta.
♦ Surface : 5 187 m2.
♦ Calendrier : livraison en 2016.
♦ Coût travaux bâtiment : 11,3 millions d'euros HT.