Rédigé par Alexis Diop et Claire Simon | Publié le 21/06/2018
Dans cette exposition, le cadre fait évènement en se donnant à voir en tant que tel : sa re-présentation entraîne la nécessaire mise en perspective des narrations qui s’y déploient. Là où Arthur Crestani mesure l’écart entre les mirages publicitaires et les lacunes béantes de l’urbanisation indienne, Léonard Martin tisse une narration liant ses êtres de peinture, ses êtres de carton et ses décors. Les deux projets invitent ainsi à repenser conjointement notre rapport à l’histoire de l’art, à l’idéologie du progrès et à la logique néolibérale. Ils interrogent ce qui fait norme à la lumière de réflexions formelles, écologiques ou politiques.
Le Prix Dauphine pour l’Art Contemporain est une initiative étudiante créée en 2014. Les plateformes de soutien pour la jeune création plasticienne sont nombreuses et nécessaires pour la visibilité et la professionnalisation d’artistes en début de carrière, mais aussi d’autres acteurs du monde de l’Art. Le Prix Dauphine pour l’Art Contemporain a donc souhaité privilégier cette année encore le binôme artiste/curateur et ainsi promouvoir les liens qui les unissent et la capacité créatrice de la mise en exposition. Fidèle allié de l’artiste et dorénavant acteur incontournable de la scène créative contemporaine, le curateur est avant tout un professionnel aux multiples fonctions. Conseiller, rédacteur, scénographe ou encore producteur, il exerce toutes les missions relatives à la valorisation de l’initiative artistique. Indépendant ou salarié d’une institution culturelle, le curateur s’engage à mettre en lumière le travail d’un artiste, voire à conceptualiser l’exposition dans son ensemble.
BAD CITY DREAMS - Série photographique d'Arthur Crestani
L’urbanisation indienne ressemble à une fabrique à rêves. A Gurgaon, la « Millenium City » en banlieue de Delhi, les publicités immobilières offrent des visions idylliques de la ville de demain. Inspiré par la tradition indienne du portrait mis en scène, Arthur Crestani s’est emparé de ces visuels publicitaires comme décors au milieu des chantiers et des nouveaux complexes résidentiels. Réalisée en mars 2017,Bad City Dreams a déjà fait l’objet de plusieurs expositions, notamment en 2017 lors du concours Archifoto, dont la série a été lauréate, et au Centquatre pour le festival Circulation(s). Une scénographie originale et immersive est proposée pour la Galerie du Crous.
Pour la thématique (Hors) Cadre, Bad City Dreams joue avec les décors par l’usage de fonds de studio photo. Instrument de décontextualisation, le fond exclut habituellement tout hors cadre, permettant ainsi la création d’un univers particulier.
Arthur Crestani, non sans humour, invite le spectateur à aller et venir entre fantasmes immobiliers, paysages périurbains en transition et portraits de travailleurs migrants et villageois déracinés. Sous le vernis de l’effervescence clinquante des brochures immobilières et la projection de vidéos promotionnelles, la réalité brute des photographies subsiste comme un mauvais rêve.