Non sans quelques réserves, la rédaction d’EcologiK s’est rendue fin 2015 en Espagne pour tester le prototype Audi R7 autonome. Présenter une telle démarche dans un magazine spécialisé en architecture et urbanisme durable, est-ce une gageure ? du greenwashing ? Pas nécessairement… En effet, le géant allemand ne tente pas ici de reverdir son blason, mais d’anticiper les évolutions de la cité de demain pour que ses engins motorisés ne soient plus un problème… mais une partie de la solution. Pour cela, la firme a instauré un prix dédié à la mobilité urbaine : le Audi Urban Future Award. Le 17 novembre 2015, deux villes partenaires de l’édition 2014 de ce palmarès, des agglomérations touchées de près par l’omniprésence de la voiture, sont venues à Barcelone présenter leurs projets : Mexico, où les conducteurs en provenance de banlieue passent en moyenne deux heures et demie par jour dans les bouchons, et Somerville, aux États-Unis (Massachusetts), où 50 % de la superficie est occupée par les automobiles ! Ainsi, pour Rupert Stadler, PDG de la marque, il n’y aura pas moins de véhicules, mais ils prendront moins de place, et seront connectés à la ville, à ses usagers et à ses besoins en temps réel. Par exemple, les voies et les feux s’adapteront automatiquement au flux de la circulation afin d’éviter les bouchons. Autre illustration du champ des possibles offert par la technologie : dans un parking, le passager pourra bientôt descendre de sa voiture qui se garera seule, au plus près de ses voisines. Plus besoin donc de bas-côtés pour ouvrir les portières. De cette manière, Audi pense pouvoir gagner 2 mètres carrés par place de stationnement ! Cela permettrait de réduire de 60 % la superficie urbaine occupée par les parkings pour réaliser des jardins, des circulations piétonnes, des logements, des équipements, des locaux d’activités, etc. Au nord de Boston, le maire de Somerville, Joe Curtatone, souhaite ainsi diminuer d’ici à 2040 la proportion d’espace envahi par les quatre roues de 50 à 20 %, au profit des citadins (de 20 à 40 %) et des quartiers d’affaires (de 30 à 40 %). Cette ligne de conduite aiderait à améliorer la qualité de l’air, le bien-être de la population… mais aussi l’économie ! Car perdre du temps dans les embouteillages puis à chercher une place de parking nuit considérablement à la productivité et à la compétitivité. Avec 22 millions d’habitants et 9 millions de véhicules, la mégalopole de Mexico et sa récente zone tertiaire de Santa Fe en savent quelque chose… À titre d’exemple, un suburbain passe environ un mois par an dans sa voiture, à une vitesse de 6 kilomètres par heure en moyenne durant les périodes de pointe – soit à peine plus que s’il se déplaçait à pied ! Pour Luis Enrique Fuentes Cortizo, directeur général de l’urbanisme et des routes au secrétariat de la mobilité, et l’architecte-urbaniste José Castillo, l’augmentation de la densité d’utilisateurs provoquée par la construction du quartier de Santa Fe, sans accroissement parallèle des infrastructures de transport, a exacerbé le problème. Ils vont même jusqu’à dire que son succès a été une des pires choses qui soit arrivée à ce secteur de la capitale mexicaine ! Ils proposent d’intensifier le partage de véhicules entre employés et d’adapter les horaires de travail en fonction du trafic. L’automobile, ennemie du développement durable ? Il s’agit ici d’aborder la problématique autrement et de la considérer non plus comme un produit, mais comme un service. C’est ce que soutient Mathilde Marengo, responsable communication et publications à l’IAAC (Institute for Advanced Architecture of Catalonia), partenaire d’Audi. En somme, composer avec la voiture… mais avec intelligence !