L’histoire débute en 2006, quand trois étudiants de l’École d’architecture de Paris-Belleville (ENSAPB) décident de remettre d’aplomb un bureau des élèves quelque peu délaissé. Ils reprennent le journal de l’établissement et commencent à organiser des événements. Rapidement, un petit pécule s’amoncelle. Partant du constat que peu de leurs comparses ont déjà mis la main à la pâte – un comble pour de futurs praticiens – ils décident d’organiser un festival de construction. « Certains architectes expliquent à un menuisier comment raboter, alors qu’ils ne l’ont jamais fait », résume Antoine Aubinais, un des membres fondateurs – la tête dans les nuages, les doigts dans le cambouis. Bellastock est né.
Architectures à l’œuvre
Depuis, avec le soutien indéfectible de l’ENSAPB, cinq architectes à plein-temps, quatre-vingts bénévoles et cent membres actifs se démènent pour faire vivre la structure. De 100 participants en 2006, l’événement ameute dorénavant plus de 1 000 personnes durant trois voire quatre jours, avec un lieu et un thème différents à chaque fois, le tout en autogestion. Une organisation sans faille à laquelle les hôtes se sont formés sur le tas, à l’image d’une profession qu’ils ont décidé de pratiquer autrement. Ainsi, tous les ans, en un ou deux mois, ils érigent quartier général, atelier, douches, w.-c, bar (puisqu’il le faut !) et cuisine. Avec une nouveauté cette année : la participation de l’association Disco Soupe qui a sustenté les 1 000 bouches à nourrir en préparant des mets à base de produits invendus ou de rebuts récupérés à Rungis. Une démarche écoresponsable qui se reflète dans le choix des sujets. Au « Grand détournement » de 2012, axé autour du recyclage, a succédé en 2013 Greenwashing¹ au cours duquel le millier d’inscrits a érigé une ville éphémère végétale. Cette édition n’a d’ailleurs pas été une sinécure avec un changement de dernière minute concernant le site de l’événement. L’équipe n’a finalement eu qu’une semaine pour monter les infrastructures nécessaires à un autre endroit, trouvé in extremis en Essonne ! « Nous avons réuni les quatre-vingts bénévoles en leur disant que nous n’avions plus de lieu… et en leur demandant s’ils avaient une solution. Une personne a levé la main. Des amis de ses parents, anciens ferrailleurs, possédaient un terrain où se fournissaient Arman, Niki de Saint-Phalle, etc. Nous avons ensuite eu les autorisations en quelques jours », livre Antoine Aubinais. Au final, de ces villes éphémères érigées, il ne subsiste que la mémoire et le savoir-faire accumulés. Pas un déchet, et même une centaine d’espèces de végétaux plantée lors de la dernière édition. Structures en bois et bâches en plastique de 2006 à 2008, palettes en 2009, sacs de sable en 2010, structures gonflables en 2011, matériaux recyclés en 2012 et plantes en 2013… Les idées ne font pas défaut et Bellastock s’exporte maintenant : Allemagne, Danemark, Espagne, Mexique, Turquie, Chili, Chine et Québec, avec une hypothétique édition à venir dans le désert algérien !
1. Le terme greenwashing désigne une méthode de marketing visant à donner une image durable à une organisation, une entreprise ou un produit, sans réel investissement et/ou action en ce sens.