Élue en 2019 Capitale européenne de l'économie sociale et solidaire, Strasbourg a tout d'une ville circulaire. Territoire aux convictions environnementales fortes, elle a été nommée « Meilleure grande ville pour la biodiversité » en 2017 et a figuré parmi les trois villes finalistes au titre de Capitale verte européenne 2021 (aux côtés de Lille et de Lahti, en Finlande). Depuis 2015, l'Euro métropole encourage de nombreuses initiatives porteuses de valeurs sociales et environnementales, impliquant la collecte, le réemploi et le recyclage des déchets.
Des synergies nouvelles au PAS
Parmi les propositions soutenues par l'Euro métropole, une vaste démarche d'écologie industrielle et territoriale crée depuis 2013 des synergies entre 26 sociétés installées sur le Port Autonome de Strasbourg - PAS. L'idée : tirer profit de la concentration d'activités industrielles pour mutualiser équipements et pratiques. Ainsi, pour limiter les trajets routiers, un même prestataire local se charge du recyclage des cartons de tous les industriels ; les chutes de bois sont réutilisées par le voisin qui possède une chaufferie hybride ; en cas de casse, les palettes sont toutes réparées dans un même atelier ; les achats de consommables sont groupés et communs.
Des expérimentations originales ont vu le jour : pendant trois ans, la malterie du port a accueilli sur son site une start-up produisant des micro algues alimentaires, nourries par l'eau de rinçage de l'orge. Dinara Bourgeois, chargée de mission économie circulaire à l'Eurométropole de la capitale alsacienne, se réjouit du changement progressif des mentalités : « Aujourd'hui, l'impact le plus direct de ces initiatives est la transformation de culture des entreprises. Elles prennent l'habitude et le réflexe de s'intéresser aux pratiques de leurs voisins. Il y a parfois des projets qui ne fonctionnent pas, mais on reste ouverts au dia logue. Tout en gardant, bien sûr, un esprit critique. Ce que l'on a envie de mettre en place, ce sont des relations de confiance avec le monde économique pour continuer d'avancer ensemble sur le sujet de l'économie circulaire. »
Les enjeux phares de cette belle opération, coordonnée par la collectivité en partenariat avec le PAS, la Région Grand Est, l'Ademe et le Groupement des Usagers des Ports de Strasbourg (structure porteuse du projet) sont multiples : favoriser l'ancrage local et optimiser la gestion des ressources et la valorisation des matières, afin de réduire l'impact environne mental de l'activité industrielle.
Recycler et revaloriser toujours plus
Parmi les objectifs de l'Eurométropole à horizon 2030, la gestion, la réduction et la revalorisation des déchets occupe une place de choix. Quelques exemples : développer de nouvelles filières pour atteindre 75 % de recyclage du plastique, augmenter les tonnages de verre provenant du tri, collecter séparément des déchets alimentaires et ainsi éviter plus de 10 000 tonnes de déchets non incinérés.
Afin d'encourager le réemploi de mobilier, la ville a lancé en 2019 un appel d'offres inédit pour aménager, de manière créative et écologique, les locaux de la pépinière d'entreprises du quartier de Hautepierre avec des meubles issus du marché de l'occasion.
Des pièces chinées chez Emmaüs aux matériaux hétéroclites côtoient des mange debout on ne peut plus originaux, constitués de tambours de lave-linge. Cette démarche, pleine de bon sens, va être généralisée à d'autres pépinières et au sein même de la collectivité. Côté TLC (textiles d'habillement, linge de maison, chaussures des ménages), la filière de valorisation bénéficie depuis deux ans d'un conventionnement entre l'Eurométropole et les collecteurs locaux (Emmaüs Mundolsheim, Horizon Amitié, Le Relais Est et Vetis) via un dispositif innovant : les services d'intérêt économique général (SIEG). Aujourd'hui, le territoire affiche l'un des meilleurs taux d'équipement en France et le nombre de points d'apport volontaire est passé de 321 en 2015 à 408 en 2017. La proportion de réemploi des TLC s'élève à 60 % et du recyclage à 37 %, avec uniquement 3 % de déchets. Dans le secteur de l'énergie, le projet Biovalsan, porté par la municipalité, le Réseau GDS et Suez Eau France, a permis d'atteindre la carboneutralité de la filière locale de traitement des boues de station d'épuration, en produisant de l'énergie renouvelable sous forme de bio méthane, pouvant couvrir les besoins quotidiens en chauffage de 5 000 logements BBC.
Rappelons enfin que c'est une entreprise d'insertion strasbourgeoise, Envie (l'une des plus anciennes dans le réseau de l'économie sociale et solidaire), qui a initié le concept du Green Friday en 2017, s'opposant au Black Friday, ce vendredi de fin novembre « consumériste » venu tout droit des États-Unis. Ce jour-là, à Strasbourg, on organise par exemple des « vide-greniers sans denier », où tout est disponible en troc.
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